Depuis sa création en 1974, Playmobil a su se tailler une place de choix dans l’univers du jouet. Ces petites figurines colorées, aux formes simples et aux univers variés, ont su conquérir le cœur des enfants et des adultes du monde entier. Mais comment cette entreprise allemande a-t-elle réussi à s’imposer sur le marché du jouet ? Et quels défis rencontre-t-elle aujourd’hui ?
L’histoire de Playmobil : une success story à l’allemande
L’histoire de Playmobil commence en 1974, en pleine crise pétrolière. Hans Beck, un employé de la société de jouets allemande Geobra Brandstätter, est chargé de créer un nouveau jouet qui consommerait moins de plastique. Il imagine alors de petites figurines de 7,5 cm, aux formes simples et aux accessoires interchangeables. Les premiers thèmes proposés sont les indiens, les chevaliers et les ouvriers du bâtiment. Le succès est immédiat en Allemagne, puis dans le reste du monde.
Au fil des années, Playmobil a su se renouveler en proposant de nouveaux univers, en phase avec les centres d’intérêt des enfants : la ferme, la police, les pompiers, l’espace, les pirates… La marque a également su s’adapter aux évolutions de la société, en proposant par exemple des figurines féminines dans des rôles traditionnellement masculins.
Crise externe
Cependant, malgré son succès historique, Playmobil fait face à des défis de taille. La concurrence est de plus en plus rude sur le marché du jouet, avec l’arrivée de nouvelles technologies et l’essor des jeux vidéo. De plus, la crise sanitaire de la COVID-19 a eu un impact significatif sur l’industrie du jouet, avec la fermeture des magasins et les difficultés d’approvisionnement.
Playmobil doit également faire face à des enjeux environnementaux. En effet, la production de jouets en plastique est de plus en plus critiquée, et les consommateurs sont de plus en plus sensibles à l’impact environnemental des produits qu’ils achètent. Playmobil doit donc trouver des solutions pour réduire son empreinte écologique, tout en conservant la qualité et la sécurité de ses produits.
Enfin, la marque doit continuer à innover pour rester attractive aux yeux des enfants, dans un monde où les écrans prennent une place de plus en plus importante. Cela passe par la création de nouveaux univers, mais aussi par l’intégration de technologies numériques dans ses jouets.
Crise interne
Il semble que Playmobil ait récemment traversé une période de turbulences internes. En effet, le directeur général de l’entreprise, Steffen Höpfner, a annoncé son départ en juillet 2023. Cette annonce est intervenue dans un contexte de tensions croissantes au sein de l’entreprise, sur fond de crise commerciale.
La société a connu des difficultés économiques, notamment en raison de l’inflation des matières premières et de son retrait du marché russe l’année dernière. Face à ces défis, la société a entamé une restructuration plus tôt cette année, avec l’aide du cabinet de conseil McKinsey, pour trouver de nouveaux leviers de croissance. Cependant, quelques mois plus tard, les résultats sont plus que mitigés.
Les organisations syndicales de l’entreprise ont dénoncé un climat toxique instauré par la direction pour pousser les employés à partir. Ils évoquent « la peur et les humiliations » que le personnel subit. « Vous piétinez l’héritage », a même lancé le comité d’entreprise aux dirigeants.
Ces tensions internes et ces difficultés économiques ont eu un impact sur l’activité du groupe. Entre 2021 et 2022, le chiffre d’affaires consolidé du groupe a diminué de 4,3%, pour atteindre 691 millions d’euros. Les dirigeants de l’entreprise prévoient une nouvelle baisse du chiffre d’affaires en 2023, en raison de l’inflation et de la baisse de la demande qu’elle devrait entraîner.
Ces problèmes de gestion et ces défis économiques constituent un défi majeur pour le successeur de Steffen Höpfner. Pour l’instant, l’identité de la personne qui prendra la tête de l’entreprise n’est pas encore connue.
Un élargissement de cible vers les adultes et collectionneurs assez mmmmh osé …
Playmobil a récemment étendu son univers en se lançant dans des licences de films et de séries télévisées, comme Ghostbusters et Dreamworks Dragons. Cela a permis à l’entreprise d’augmenter ses profits de 11% pour atteindre 679 millions d’euros. Cependant, cette stratégie semble viser davantage les collectionneurs adultes que les enfants.
Les licences de films et de séries télévisées ont un fort potentiel de nostalgie pour les adultes qui ont grandi avec ces franchises. Par exemple, la ligne Ghostbusters de Playmobil a été étendue pour inclure des sets basés sur Ghostbusters II, qui comportent des hologrammes activés par smartphone. Ces produits peuvent attirer les collectionneurs adultes qui se souviennent de ces films et séries de leur enfance.
Cependant, cette stratégie peut avoir un impact sur l’attrait de Playmobil pour les enfants. Les thèmes historiques et de la vie quotidienne, qui étaient auparavant le cœur de l’offre de Playmobil, peuvent être plus attrayants pour les enfants et encourager un jeu plus imaginatif. En se concentrant sur les licences de films et de séries télévisées, Playmobil risque de perdre une partie de son attrait pour les enfants.
Il est donc crucial pour Playmobil de trouver un équilibre entre l’exploitation de ces licences lucratives et le maintien de son attrait pour les enfants. Cela pourrait impliquer de continuer à développer de nouveaux thèmes basés sur la vie quotidienne et l’histoire, tout en explorant des licences de films et de séries télévisées qui sont populaires auprès des enfants d’aujourd’hui.
Playmobil vs Lego
La rivalité entre Playmobil et Lego est un sujet fascinant. Ces deux géants du jouet ont adopté des stratégies différentes pour rester pertinents sur le marché. Playmobil a tendance à reproduire les univers familiers des parents, avec des mises à jour occasionnelles pour rester actuels. Lego, en revanche, mise sur l’innovation constante. Les deux entreprises ont un processus de développement de produit de deux ans, avec des designers qui décident des nouveaux univers à explorer.
La bataille pour obtenir des licences lucratives est également un aspect crucial de leur stratégie. Playmobil a tendance à choisir des licences qui sont plus familières aux parents, tandis que Lego choisit des licences qui sont populaires parmi les enfants et les adultes. Cela a conduit à une diversité de produits qui reflètent les intérêts variés de leurs publics cibles.
L’échec de Playmobil au cinéma est un autre exemple de la difficulté de la marque à toucher son public cible. Le film « Playmobil: The Movie » n’a pas réussi à captiver le public de la même manière que les films Lego ou Barbie. Cela pourrait être dû à plusieurs facteurs, notamment un scénario moins attrayant, un manque de personnages familiers issus de licences populaires, ou une promotion insuffisante du film. Quoi qu’il en soit, cet échec au box-office souligne l’importance d’une stratégie de marque cohérente et centrée sur le public cible.
Et si les meilleures licences actuelles étaient les youtubeurs et influenceurs ?
À l’heure actuelle, il semble que Playmobil n’ait pas encore exploré la possibilité de créer des collections basées sur des YouTubers ou des influenceurs populaires auprès des jeunes. Cependant, c’est une idée qui pourrait avoir du potentiel.
Les YouTubers et les influenceurs ont une grande influence sur les jeunes d’aujourd’hui. Ils sont souvent considérés comme des modèles et ont une portée considérable. Créer des collections de jouets basées sur ces personnalités pourrait être un moyen efficace pour Playmobil de se reconnecter avec son public cible.
Cela dit, il y a aussi des défis à relever. Les YouTubers et les influenceurs sont souvent associés à des contenus numériques et interactifs, ce qui est très différent de l’expérience de jeu physique que proposent les jouets Playmobil. De plus, la popularité des influenceurs peut être éphémère, ce qui pourrait rendre difficile la création de collections de jouets durables basées sur ces personnalités.
En effet, plusieurs fabricants de jouets ont déjà collaboré avec des influenceurs ou des personnalités populaires pour créer des collections spéciales. Par exemple, la WWE (World Wrestling Entertainment) a depuis longtemps des partenariats avec des fabricants de jouets pour créer des figurines à l’image de leurs catcheurs les plus populaires. Ces figurines sont généralement très populaires auprès des fans de catch et ont été un succès commercial.
Dans l’autre sens c’est déjà le cas pour le meilleur du pire
Les influenceurs jouent un rôle de plus en plus important dans le monde du jouet. Ils ont la capacité d’engager les audiences et de mettre en valeur les produits d’une manière qui suscite l’intérêt et l’excitation. Les entreprises de jouets reconnaissent de plus en plus la valeur des influenceurs en tant que principaux vendeurs de jouets, et leur popularité en ligne ne cesse de croître.
Les meilleurs influenceurs de jouets ne se contentent pas de présenter de nouveaux produits et jeux, ils montrent aux audiences pourquoi ils devraient les vouloir. Ils partagent non seulement des critiques de jouets, mais aussi leur personnalité, ce qui attire les foules.
La vidéo est un outil de plus en plus important pour les campagnes de jouets, en particulier sur des plateformes comme TikTok. Des marques populaires comme Mattel, Hasbro, Lego et Marvel ont continué à étendre leur portée sur TikTok, introduisant davantage de campagnes d’influenceurs pour mettre en avant leurs nouvelles sorties de jouets.
Il existe de nombreux influenceurs de jouets qui ont réussi à attirer un grand nombre de followers grâce à leur contenu attrayant et engageant. Parmi eux, on trouve Rhia.Official, ITZSHAUNI, JakeBSweet, audreyteguh, bright_little_brains, duaneshootstoys, kimmytoyz, TikTokSupers, et the_williamsons.
Let’s Finish it!
En conclusion, Playmobil, malgré son héritage et sa popularité, traverse une période difficile. La marque a du mal à rester pertinente pour son public cible, les enfants, en raison de choix de licences et de partenariats qui semblent viser davantage les collectionneurs adultes. Les licences de films et de séries télévisées, bien que lucratives, peuvent ne pas résonner avec les enfants d’aujourd’hui. De plus, l’ambiance interne de l’entreprise a été affectée par des problèmes de gestion, ce qui a conduit à la démission du directeur général.
Ces défis soulignent l’importance d’une stratégie de marque cohérente et centrée sur le public cible. Pour rester pertinente et compétitive, Playmobil doit trouver un équilibre entre l’exploitation de nouvelles opportunités, comme les licences de films et de séries télévisées, et le maintien de ce qui a fait le succès de la marque : des univers de jeu imaginatifs qui stimulent l’imagination des enfants.
L’avenir de Playmobil dépendra de sa capacité à naviguer dans ces eaux tumultueuses et à redresser la situation. Cela nécessitera une réflexion stratégique, une connaissance approfondie de son public cible et une volonté de revenir à ce qui a fait le succès de la marque.